Enfant, on ne s’imagine pas à un moment de sa vie devenir accompagnant(e) d’un parent malade. Pourtant en 2017, je vais le devenir par la force des choses.
Comme détaillé dans mon article sur l’annonce de la maladie de mon papa, j’ai malgré moi, dû m’occuper de choses inimaginable à 30 ans.
Je suis passé du statut d’enfant à celui en quelque sorte de parents.
Devenir accompagnant(e) malade à distance
Une de mes plus grosses difficultés dans tout ceci, devoir gérer mon papa malade avec la distance. En effet, ce dernier habitait à Paris et moi à Nice, cela a donné lieu à des situations rocambolesques, des doutes, des craintes, des angoisses.
La première décision fut suite à son hospitalisation, étant désignée personne de confiance, j’ai dû décider selon les résultats si le corps médical devait continuer jusqu’au bout ou pas d’acharnement.
La seconde, donner mon accord pour un retour à domicile avant sa prochaine hospitalisation pour traiter son cancer. Je dois le dire, en acceptant de le faire rentrer chez lui, je ne savais pas dans quoi j’embarquais.
Le jour de son retour, mon père a été trouvé au sol par l’infirmière, la porte grande ouverte avec une alternante de la pharmacie en train de partir, le laissant ainsi sur par terre.
Autant, vous dire, l’infirmière a fait scandale auprès de l’alternante et de la pharmacie, j’ai réalisé le mien également. Comme expliqué au directeur, je peux comprendre le stress, la panique, mais partir sans même appeler de l’aide, voisins, pompiers ou même la pharmacie pour prendre conseil, c’est limite, surtout lorsque l’on fait des études dans le médical.
La première nuit fut compliquée, mon père en voulant se lever est tombé. J’ai dû à 3 heures du matin le relever, pour l’aider à se remettre dans le lit. Pour vous résumer, mon père, 1m86 pour 85 kilos à ce moment-là. Je ne sais pas comment j’ai réussi à le soulever, ni comment je ne me suis pas bloqué le dos (n’étant pas formé aux techniques pour soulever où déplacer une personne malade).
On peut le dire, le décor était planté…
Par la suite, mon père est retourné à l’hôpital afin de traiter son cancer du larynx. Les choses vont alors se compliquer, mon papa se fait voler ses papiers. Étant à 1000 km, je ne vous cache pas l’inquiétude. Les papiers sous-entendent Pièce d’Identité, carte bancaire, carte vitale, etc. (potentiellement usurpation d’identité, fraude sur son compte). Heureusement, l’hôpital fait opposition de suite pour sa carte bancaire, pour le reste, je dois me débrouiller.
À distance, une carte d’identité et carte vitale, impossible à refaire, on m’indique que je dois attendre la sortie d’hôpital de mon papa.

Les difficultés d'un malade à distance
Ainsi, janvier 2018, il sort de l’hôpital, nous organisons d’ailleurs avec une assistante sociale un rendez-vous, afin d’aménager son logement et de lui permettre de pouvoir rester chez lui en toute sécurité.
Je prends vraiment conscience à cet instant que dorénavant, je vais décider de tout pour lui.
J’entame les démarches pour refaire sa pièce d’identité, étant sortie de l’hôpital, le problème : déposer plainte. Même si je prends un rendez-vous, mon père sera trop faible pour s’y rendre. Je récupérerais quand même en mairie un dossier pour faire une Pièce d’Identité.
La carte vitale, je n’en parle même pas… J’explique la situation comme quoi mon papa s’est fait voler ses papiers, il est impossible pour lui de se déplacer (étant trop faible physiquement et des problèmes de motricités), de plus je suis sans véhicule. Je souhaite connaître les possibilités vu le cas de figure. La personne me répondra tout simplement, qu’il n’y a pas de problèmes, il faut juste se présenter avec mon père et les papiers à la CPAM qui est à l’autre bout du département. Je vais répéter 2 fois le discours de la situation de mon papa, avec autant de fois la même réponse. J’abandonne, comprenant que la personne au bout du fil ne souhaite pas déroger de son discours où à chercher.
Je vous épargne la péripétie du canapé où je demande une livraison à la porte + montage. Les livreurs soufflent fort de devoir le monter et repartent sans le monter, parce que forcément, il y a eu un bug et que l’option montage a disparue (mon père n’étant pas bricoleur, zéro outil pour le faire moi-même).
Être accompagnant(e) dans mon cas, c’est devoir gérer beaucoup d’administratif. J’ai dû faire le nécessaire pour que toutes les factures soient prélevées, afin que mon père ne rencontre pas de soucis pour son loyer, l’eau, le gaz, l’électricité, Internet, etc.
J’ai choisi de conserver son logement, même si dans les faits en 2 ans ½, il a dû y rester 4 ou 5 mois grands maximum. C’était aussi, lors de mes nombreux allers-retours, mon pied-à- terre.

Des sacrifices , une grosse charge mentale
La distance et la maladie donnent lieu à beaucoup de sacrifice personnel et professionnel.
Côté perso, pendant 2 ans, toutes mes vacances étaient réservés exclusivement à Paris (je pouvais poser 3 – 4 jours par-ci, par là, afin de remonter voir mon papa, gérer l’administratif, amener des affaires à l’hôpital, etc.). Puis suite au décès de mon père, au tour de ma mère malade.
On ne se rend pas compte de l’importance de ce moment où l’on se coupe de tout, de profiter, de savourer, d’être déconnecté tout simplement.
En 2022, au bout de 5 ans de relation avec mon conjoint, nous avons pu enfin partir en vacances comme nous le souhaitions.
Côté Pro, j’ai eu énormément de chance d’avoir des patrons extrêmement compréhensifs et humains, jamais, ils ne m’ont reprochées mes absences, toujours conciliants. Également, une équipe en boutique se serrant les coudes. Le revers de la médaille, je n’étais pas toujours présente mentalement, pas toujours concentrée. Bref ! Pas au top de mes capacités, même si on ne me l’a jamais reproché, c’est quelque chose de difficile à vivre lorsqu’on est exigeant avec soi.

Être fier(e) de soi
Avec cet article, je ne souhaite pas enjoliver ou effrayer le fait d’être une personne accompagnant(e), c’est un rôle difficile que l’on soit proche ou à distance. Il faut avoir conscience que les nerfs sont mis à rude épreuve, c’est une bataille permanente, que ça soit avec le/la malade, les organismes, le corps médical. La charge mentale est énorme, vous devez anticiper, organiser, vous assurer que votre proche est dans de bonne condition, que tout est au carré.
Un des premiers moment où j’ai commencer à ressentir un peu de légèreté, lorsque j’ai réussi à transférer mon papa dans un EHPAD à 15 min à pied de notre domicile.
Je le savais encadré, la partie médicale gérée par leurs soins. Il ne me restait plus qu’une partie administrative, m’occuper de son linge et pouvoir passer du temps ensemble.
Si vous êtes dans cette situation où l’avez été, soyez fièr(e) de vous, soyez indulgent. Tout ne sera pas parfait, mais nous faisons ce que nous pouvons avec nos moyens. Ce rôle permet de découvrir en soi certaines ressources insoupçonnées.
Le seul conseil que je me permettrais de vous dire, accordez-vous des pauses (cinéma, promenade, spectacle, restaurant, massage, City-break) .
Surtout, prenez soin de vous, c’est le plus important.